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ÉDITO 2008

Deux hommes discutent dans un bus. Deux professeurs. Ils feuillettent un devoir universitaire d’une centaine de pages imprimées au recto. Leurs gestes n’ont rien de négligent, mais marquent une habitude de manipulation. Le document porte sur les musiques métissées en Iran. On comprend vite qu’il présente quelques faiblesses. Et cela semble mettre à mal l’humeur d’un des deux hommes. En étant correcteur, il a permis à un étudiant de poursuivre ses études en France. Ce dernier a pu bénéficier d’une carte de séjour.
Il n’est pas récompensé, l’étudiant doit avoir la tête ailleurs.
Il existe un hiatus dans la relation qu’entretiennent le professeur et l’étudiant. Il n’y a pas seulement une demande voire une attente de l’un auquel l’autre ne répond pas, mais un enjeu. La décision du professeur peut avoir de graves conséquences. Ce pouvoir l’embarrasse, il dépasse son champ d’action. Et pourtant, son action s’avère potentiellement capable de changer une existence, irrémédiablement. L’étudiant embarrasse plus que le professeur, il embarrasse l’homme. La discussion glissera ensuite sur la difficulté de poser un carrelage et sur la possibilité de faire un régime à moins de pratiquer un sport.
Notre croyance dans le progrès nous condamne-t-elle à passer du désir d’un destin miraculeux à une conscience douloureuse ?
Dans l’intimité et les déboires des uns et des autres, proximité relative du reality show que l’on suit pas à pas sur nos écrans télés, s’élabore la mise en scène des sentiments et des émotions afin, finalement, de les rendre supportables. En corollaire, les images issues des reportages et des documentaires où se voit les guerres, les famines, la diversité des êtres et des paysages ainsi que leurs disparitions en cours, comme autant de plaies. L’espace entre les individus se pense de façon plus restreinte, plus rapprochée de sorte que l’on puisse encore l’envisager. Parce que désormais, le reste va peut-être au-delà de notre entendement.
Le thème commun aux événements du festival a, cette année, pour titre : Le mal des hommes. Ces événements s’articulent autour d’une sélection de films considérés comme expérimentaux.
P’Silo organise la 8ème édition du festival international de vidéo expérimentale Images Contre Nature. Elle se déroulera du 19 juin au 9 juillet 2008 à Marseille : au Rendez-vous des quais, à l’Espaceculture, au Videodrome et aux Lices.
H.B.